300 kilomètres

Après avoir réalisé Massy -> Dunkerque en 295kilomètres, je me suis dit que je pouvais faire Dunkerque -> Massy en dépassant les 300 kilomètres.

Les sensations sont bizarres à l’heure du départ. Je ne sais jamais dans quoi je me lance, je vise simplement un point sur une carte comme cible. J’ai préparé un « parcours », des noms de ville, de village, de bourg, de lieu-dit ; J’ai noté les numéros des routes reliant ces cités. Des routes départementales sur la première partie du trajet, ça risque de circuler et de ne pas être très agréable, mais une fois que j’aurai atteint Saint Riquier, les routes devraient être plus tranquille. Ce retour n’est pas réfléchi depuis plusieurs jours, voir plusieurs semaines ; c’est une possibilité qui est devenu évidente, l’échec (relatif) des 295 kilomètres lors de la monté sur Dunkerque, à cinq kilomètres près. C’est donc l’idée de passer les 300 kilomètres dans la journée qui me motive, et d’enchaîner, au sens de sublimer l’effort et non pas de me confronter à la difficulté au point de m’enfermer dans une aventure impossible, les long trajets ; je me laisse la possibilité de prendre le train. C’est aussi le sentiment de bien être, difficilement descriptible, je crois que c’est l’expérience d’avancer à la force de son propre corps et de voir les paysages changer, de voir les kilomètres défiler qui me pousse à pédaler.

J’ai prévu de partir pour 7h30. Du coup je suis réveillé « naturellement » à 5h30. Je me prépare tranquillement, je demande à mes autres moi si ils ont envies de passer une journée à pédaler sur un vélo. La réponse est mitigée, mais l’Ego ne recule pas et affronte l’épreuve !

Mon père a mis le réveil pour voir ce départ, et pour m’encourager. J’apprécie, bien que c’est des moments que j’ai du mal à partager, je me projette sur ce qui peut arriver. À 6h30 le vélo est dehors, j’ai juste un petit sac à dos, pas de porte bagage pour ce retour, ça sera moins de pause, plus de régularité. Dans le sac il y a deux litres d’eau, de quoi réparer tous les problèmes mineurs sur le vélo, un portefeuille, des clés, un portable et son chargeur.

Je me lance en m’élançant, un au revoir à mon père qui reste perplexe non pas sur la faisabilité du périple, mais sur le pourquoi ; je fais des suppositions. Je remonte la rue Albert Cys, je traverse le canal, la ville est silencieuse, je prends la direction de Bergues comme quand je suis arrivé ; c’est ensuite que je bifurque et que je serai à moins de  cinquante kilomètres de la manche. Mes principales villes sont Saint Omer, Abbeville, Beauvais. À Saint Omer, je trouve un supermarché, j’achète deux bananes, j’en mange une et je glisse la seconde dans le sac. Je repars, je galère, il pleut un crachin nordiste. Je ne m’affole pas, c’est le rôle de l’anticipation, et du mental de s’occuper de ces détails. Si je suis suffisamment prêt ça me donne presque le sourire cette pluie, ce ciel. Je me trompe de route, c’est en arrivant à un gros rond point que j’ai perdu la route que je suivais. j’ai le choix entre quatre options : 1-revenir sur mes pas, 2- poursuivre ma direction, 3-une impasse et 4-une 4 voies. Je lance google maps, me géolocalise, le plus court c’est la 4 voies sur 3 kilomètres. Je respire et je me lance, calé dans la bande d’arrêt d’urgence à 40 km/h. C’est une route limitée à 90 km/h. Je prends une sortie, je me suis fait klaxonner deux fois. Les automobilistes ne se rendent pas compte que ce n’est pas me rendre service, à chaque fois je sursaute ! Je saute de la selle ! En réalité je suis concentré sur mon environnement, je sais qu’il y a des voitures, mais je ne m’attends pas me faire klaxonner. Je retrouve une route à double sens de circulation. Je me rends compte que j’ai bien fais 7 kilomètres dans le vent. Je repars, la route est toute droite si on la regarde d’en haut, vu de profil ça monte et ça descend. Beaucoup de faux plat. Je passe devant la cabane bambou, lieu mythique !

En approchant d’Abbeville je me suis prévu un choix en fonction de mon état physique et mental : le train ou le vélo. Je choisis le vélo (ah ouais, sans blague ?!), mon itinéraire me fait passer par Saint Riquier et rejoindre des routes secondaires, voir tertiaire. Quelques kilomètres avant de bifurquer, je me fais doubler par un tracteur qui doit rouler aux alentour de 45 km/h, je prends l’aspiration. Ça me fait environ 3 kilomètres à cette vitesse et sans forcer, c’est agréable.

Je prends la direction de Saint Riquier, Abbeville est à une vingtaine de kilomètre, je vais la contourner. La route est superbe, elle a été refaite dans l’année. Je me retrouve devant la basilique type Gothique flamboyant de Saint Riquier. Je m’arrête à la boulangerie, il est 11h.

Je reprends la route, cette seconde partie de parcours est beaucoup plus agréable, moins de voiture plus de nature, je traverse la Somme et ses petits étangs. Je file vers Beauvais, la chaleur se fait sentir. Je trouve une terrasse à Beauvais ou je me requinque. Puis j’entame les derniers 100 km. J’aperçois de nombreuses moissonneuses batteuses en pleines action, La France rempli ses greniers. Le temps est idéal, il fait beau, il fait chaud. Je traverse le Vexin Français, j’apprécie toujours autant, c’est un beau lieu qui mériterait que l’on s’y attarde. Mes pensées se font moins précises, l’énergie est concentrée sur le pédalage, la respiration, la route, les voitures. Je connais la route, traverse Courdimanche par la D22, je suis la direction de Carrière sous Poissy, j’arrive en région parisienne sous un soleil de plomb, la circulation est dense, je remonte les voitures au feu rouge, elles me redoublent rarement par la suite, prises dans un autre feu rouge. 290km.

Je bascule sur Saint Germain en Laye, je connais les routes, je file, je passe les 300km, il m’en reste une vingtaine. Je suis en terrain connu, en franchissant Versailles, ça devient facile. Être sur son terrain de jeu apporte une fraîcheur. J’ai fait fusion avec le vélo. J’arrive à mon point d’arriver, il est 21h14, descendre de selle, prendre une douche, manger, et se dire que dans le fond, il aurait fallu continuer 77Km, ça aurait été jouable ! J’ai fait 323 km. Et malgré tout, mon périple m’aura fait faire un peu plus de 3000 mètres de dénivelé positif.

Prochaine étape les 400 kilomètres ; mais pour ça on passera sur un vélo taillé à ma mesure!

Affaire à suivre …

Un avis sur “300 kilomètres

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